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08 juil. 2025

La gestion de la trésorerie dans une startup : ce que les business angels doivent surveiller de près

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La gestion de la trésorerie dans une startup : ce que les business angels doivent surveiller de près

Dans une startup, la trésorerie est souvent comparée à l’oxygène : invisible mais vitale. Si une jeune pousse peut traverser plusieurs mois sans chiffre d’affaires, elle ne peut en revanche survivre sans liquidités. La gestion du cash conditionne la capacité à investir, à recruter, à pivoter, ou simplement à tenir jusqu’à la prochaine levée.

Pour les business angels, la capacité à lire et comprendre la situation de trésorerie d’une startup est essentielle, à la fois pour accompagner les fondateurs dans leur prise de décision et pour sécuriser leur propre investissement. Cette vigilance ne doit pas se traduire par une surveillance intrusive, mais bien par une posture de partenaire stratégique attentif. Elle suppose une écoute active, une bonne compréhension des métriques financières, et un dialogue régulier entre la startup et son référent.



Prévisions, écarts et capacité à piloter


Le premier indicateur à surveiller est le burn rate, c’est-à-dire la vitesse à laquelle la startup consomme sa trésorerie. Cet indicateur, mis en perspective avec le niveau de cash disponible, permet de déterminer le runway, autrement dit la durée de vie financière de la startup sans nouvelle rentrée de fonds. Suivre cette donnée mois après mois est indispensable, car elle conditionne la sérénité (ou la pression) dans laquelle l’équipe peut travailler.

Un burn rate élevé n’est pas nécessairement un signal négatif : il peut refléter une stratégie d’accélération volontaire dans la croissance, le développement produit ou la conquête commerciale. Mais il doit toujours être compris, justifié, et maîtrisé. En tant que business angel, il est important de poser les bonnes questions : quelle est la part fixe et incompressible des charges ? Quel est le seuil de rentabilité visé ? En cas d’imprévu, combien de mois la startup peut-elle tenir sans fragiliser sa mission ? Ce sont ces scénarios qui permettent de mesurer la robustesse du pilotage.

Les prévisions financières, et surtout leur comparaison avec la réalité, constituent également un point de vigilance fondamental. Il est normal qu’une startup ne colle pas exactement à son budget prévisionnel, surtout dans les premières années où les hypothèses sont encore mouvantes. En revanche, il est essentiel que les écarts soient analysés, expliqués, et pris en compte dans les versions suivantes. Cela démontre non seulement la capacité d’itération de l’équipe, mais aussi son niveau de lucidité et de transparence. Une startup qui suit régulièrement ses écarts budgétaires et ajuste son cap montre une vraie maturité de gestion – qualité trop souvent négligée dans l’euphorie de la croissance.


La discipline budgétaire au quotidien


Dans ce cadre, la qualité du reporting transmis aux actionnaires joue un rôle déterminant. Un bon reporting ne se résume pas à un tableau Excel détaillant des lignes comptables : c’est un outil de pilotage qui met en lumière les priorités, les zones de tension, les leviers activés et les résultats obtenus. Il doit refléter les dynamiques clés de l’entreprise, les résultats opérationnels et financiers, l’évolution du pipeline commercial, les tensions éventuelles sur le cash, et permettre un dialogue éclairé entre les fondateurs et leur board.

La gestion de la trésorerie, au-delà des tableaux, repose aussi sur une discipline budgétaire quotidienne. À l’amorçage, chaque euro compte. Les dépenses doivent être alignées avec les priorités stratégiques, et les arbitrages budgétaires doivent refléter une vraie logique de pilotage. Un recrutement prématuré, une campagne marketing mal ciblée ou une externalisation coûteuse peuvent peser lourdement sur la structure de coûts.

En tant que BA, il est essentiel de sensibiliser les fondateurs à cette logique de priorisation : tout projet n’a pas besoin d’un CMO dès le premier mois, ni d’un cabinet d’étude externe. Parfois, c’est une question de culture d’entreprise : mettre en place une routine de revue budgétaire mensuelle, responsabiliser les managers sur leurs lignes de dépenses, et ne pas hésiter à “geler” temporairement certaines initiatives en cas de tensions sur le cash.


Anticiper les levées, éviter les urgences


La trésorerie est directement liée à la stratégie de financement. Trop souvent, les startups attendent d’être à trois ou quatre mois de leur runway pour enclencher une nouvelle levée de fonds. Ce réflexe, compréhensible dans le feu de l’action, peut s’avérer dangereux. Une levée efficace se prépare douze mois à l’avance, voire davantage, en fonction de la maturité du marché, de la complexité du projet, ou encore de la saisonnalité des investisseurs.

Les business angels, notamment lorsqu’ils siègent au comité stratégique, ont un rôle clé à jouer dans cette anticipation. Ils peuvent accompagner les fondateurs dans la construction du plan de financement, challenger les hypothèses de revenus ou de coûts, et surtout aider à définir le bon timing. Une levée mal calée peut forcer des négociations dans l’urgence, diluer excessivement les fondateurs, ou faire entrer des investisseurs peu alignés avec la vision du projet. En mobilisant leur propre réseau, les BA peuvent aussi faciliter l’accès à des fonds ou family offices de confiance, et faire levier sur les premiers engagements pour structurer le tour.



Une vigilance bienveillante


Surveiller la trésorerie d’une startup ne signifie pas contrôler chaque dépense, ni transformer le board en cabinet d’audit. Cela signifie comprendre les dynamiques financières, questionner avec bienveillance, et construire un cadre de transparence propice à la prise de décision. Chez Paris Business Angels, nous croyons fermement que la relation entre une startup et ses investisseurs repose sur la confiance, nourrie par un dialogue régulier autour des chiffres, des objectifs et des enjeux opérationnels.

Une gestion rigoureuse de la trésorerie n’est pas seulement un gage de survie : c’est un levier fondamental pour bâtir une croissance saine et durable. C’est aussi un indicateur fort de la capacité d’une startup à devenir un jour une scale-up, puis une entreprise solide. Pour les business angels, cette posture exige de la pédagogie, de l’écoute, mais aussi une certaine exigence : car derrière les tableurs se joue l’avenir d’un projet entrepreneurial ambitieux.